Un militant italien en prison et en danger

Alfredo Cospito, anarchiste insurrectionnel italien, est détenu depuis plus de 10 ans, dont 6 ans en régime de haute sécurité dans la prison de Terni, et depuis mai 2022, il est soumis au régime carcéral de l’article 41 bis du code pénal italien dans la prison de Bancali en Sardegne. C’est l’isolement total.
Actuellement, il a été déplacé dans la prison de Opera – où il y a une structure sanitaire – à cause des conditions physiques graves dans lesquelles il se trouve suite à une grève de la faim commencée en octobre 2022.

Voici un appel signé par le Collectif Malgré Tout. Pour le signer, cliquer ici (indiquer vos nom et prénom en précisant que vous souhaitez signer l’appel).

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UN MILITANT ITALIEN EN PRISON ET EN DANGER

Alfredo Cospito, anarchiste insurrectionnel, est détenu depuis plus de 10 ans, dont 6 ans en régime de haute sécurité, et depuis le mois d’avril de l’année dernière, le régime carcéral du 41 bis a été instauré.
C’est l’isolement total.

L’article 41 bis du droit pénal est applicable pour les crimes graves de la mafia et le terrorisme.
Citant l’avocat d’Alfredo: « Le 41 bis prévoit l’utilisation du régime spécial et répressif de détention seulement pour empêcher la communication entre des détenus de premier plan ayant des rôles importants à l’intérieur de la prison et l’extérieur, dans le cadre d’une organisation pyramidale, pour écarter la possibilité que les détenus puissent continuer à donner des ordres à leurs subordonnés, comme cela se produit ou pourrait se produiredans le phénomène hiérarchique mafieux ».
Au-delà de la monstruosité en soi de ce régime carcéral, Alfredo n’a tué personne.
Il est accusé d’avoir blessé le PDG d’Ansaldo Nucleare et de l’explosion de deux petits engins explosifs à faible potentiel à proximité de l’école des Élèves Carabiniers de Fossano (Cuneo) en 2006, qui n’a causé ni blessures ni dommages matériels.
Alfredo a commencé en octobre une grève de la faim contre le 41 bis.
Une grève politique.
Alfredo dit que « la vie avec le 41bis n’est pas la vie et que si c’est le cas, autant la sacrifier dans une lutte contre la barbarie ».
Pour Alfredo, l’avocat demande la révocation du 41 bis.

Ces dernières semaines, il y a eu beaucoup de manifestations anarchistes et antifascistes et, ces derniers jours, divers appels de magistrats, d’avocats, de personnalités de la culture et de la politique pour qu’Alfredo soit retiré du régime 41 bis.
Les appels sont adressés au Ministre de la Justice, au Président de la République et au Pape. Pendant que nous écrivons, il a été obtenu d’avancer l’audience, mais l’avocat et le médecin ont lancé l’alarme: le risque qu’Alfredo meure avant est très élevé.
Le gouvernement a officiellement déclaré son refus de modifier la situation, tant par rapport au 41 bis que par rapport à la détention dans la « prison dure » d’Alfredo, qui poursuit sa grève de la faim totale.

Ce qui se passe nous est insupportable et nous fait souffrir, parce que c’est comme assister à une exécution.
Nous voulons faire parvenir à Alfredo d’autres voix de chaleur et de solidarité, aider à arrêter cette folie. Pour faire savoir que si Alfredo meurt, nous saurons qu’il aura été tué et par qui.

Alfredo Cospito, grâce à la seule possibilité qu’il a – choisir comment et au nom de quoi mourir – révèle aux yeux de beaucoup les failles, les abîmes de l’état de droit, à l’intérieur et à l’extérieur de la prison.

Le régime de détention prévu par l’article 41 bis et la prison à vie sans conditionnelle prévu par l’article 4 bis signifient – noir sur blanc – torture et peine de mort (mort dite “blanche”)

L’acharnement du gouvernement et des autorités judiciaires à l’égard d’Alfredo brille par sa férocité, sa stupidité et son hypocrisie.

Parce que ce qui est clair aujourd’hui, c’est que nous sommes dans une époque de menaces terribles : sanitaires, environnementales, climatiques, belliqueuses…
Et il suffit d’un peu d’honnêteté intellectuelle et de la capacité de ne pas se laisser submerger par le chaos médiatique, pour savoir que nous ne vivons pas sous la menace d’un réseau anarchiste et antifa italien ou international qui porterait atteinte à notre propre survie.
Ce sujet très dangereux – au nom duquel on condamne à mort Alfredo Cospito- n’existe pas.
Les vraies menaces pour notre survie existent et les coupables sont bien autres.

Les mesures exceptionnelles qui exagèrent l’urgence et deviennent ordinaires sont propres à l’ensemble de l’histoire républicaine.
Aujourd’hui, nous assistons à nouveau à une accélération et à une intensification de l’utilisation détournée de l’arsenal de l’état de droit, qui risque de le bouleverser, en contribuant à transformer – dans les faits – tout acte de dissidence en infraction pénale.

Ces derniers jours, les voix et les prises de position en faveur de la révocation du 41 bis pour Alfredo se sont multipliées.
Face à l’émergence d’un front large et varié de solidarité et d’indignation, la réponse du gouvernement est ostensiblement musclée.
L’hypocrisie coupable et structurelle de l’Etat se mesure aussi par son recours à la main de fer.
Aussi grand que puisse être le danger à contenir, l’état de droit n’envisage pas, par sa définition même, d’empiéter sur le respect des droits de la personne.

La succession et l’accumulation des proclamations de l’état d’urgence au cours des dernières années (états d’urgence sanitaire, militaire et aujourd’hui sous la forme d’un danger terroriste) forment la toile de fond devant laquelle, directement ou indirectement, la brutalité du moment se détache.

Conscients de la difficulté, nous pensons que notre époque complexe, pleine de bouleversements et d’incertitudes, nous met au défi de résister à toute forme de réductionnisme et de simplification et de rester vigilants face à l’attirail que les appareils de gestion politique mettent et mettront à chaque fois en oeuvre pour faire face aux menaces (réelles ou fictives).
La multiplication des voix nous réconforte et nous souhaitons qu’elles continuent – chaotiques, diverses, à montrer que le « roi est nu » – et que se produisent des réflexions, des actions et des liens, qui nourrissent notre envie et notre capacité de résistance.
Pour que le silence ne retombe pas sur Alfredo, sur le 41 bis, et sur la prison à vie sans conditionnelle, et pour qu’on ne passe pas sous silence les nouvelles dérives de punition préventive et de répression à toute divergence, et leur traduction en normes et pratiques d’urgence.

Nous envoyons à Alfredo notre étreinte chaleureuse et solidaire.
Notre reconnaissance aussi.

Pour le Collectif Malgré Tout
Miguel Benasayag, Bastien Cany, Teodoro Cohen, Angélique Del Rey,
Umberto Galimberti, Eleonora Missana, Mary Nicotra,
Roberta Padovano, Daniela Portonero

Signataires:

Monique Landaz
Fabienne Messica
François Gèze
Irène Panitskas
Georges Menahem
Jean-Marie Viguié
Jean-Pierre Rafier
Toni Germani
Laura Berens
Giuseppe Giannini
Roberta Frati
Marguerite Rollinde
Carlo Anselmi
Gabriele eva Plocksties
Rosalba Di Giuseppe
Isabella Maria Alma Cellerino
Giovanni Sinicato
Lucia Morra
Gianni Alioti
Roger Mathieu
Beniamino Gaudio
Monica Quirico
Roberto Budini Gattai
Annamaria Rivera
Bernard Bosc
Gianfranco Ragona
Lorena Currarini
Enzo Barone
Cellini Monica
Giuseppe Sansoni
Giovanni Battista Argenziano
Alberto Deambrogio
Franco Fuselli
Gianfranco Ragona
Julie Poitier
Donatella Ianelli
Renata Vela