Solidarité avec Mimmo Lucano, condamné à 13 ans de prison suite à un procès honteux

Mimmo Lucano, le maire du petit village de Riace, en Calabria (sud d’Italie), promoteur d’un modèle inédit d’accueil et d’intégration des migrants, a été condamné à 13 ans de prison. Ce qui est le plus frappant: l’accusation avait demandé la moitié des années de condamnation qui ont été ensuite décidées, alors qu’une condamnation de 13 ans est très rare en Italie et réservée aux crimes les plus graves. La « continuazione tra reati » (« continuation entre crimes »), mécanisme qui s’applique souvent même dans les procès contre les mafieux et qui permet de baisser la peine d’au moins la moitié, n’a pas été appliquée.

« Riace » est un modèle alternatif d’accueil et d’intégration des migrants et une tentative de repeupler un petit village du sud d’Italie, devenu désert, par cet accueil même. Lucano et les habitants de Riace ont contribué, par leurs pratiques alternatives, à la création d’un nouvel imaginaire de cohabitation, d’accueil et de relation à la situation des migrants. Maintes fois attaqué par les politiciens italiens d’extrême droite, Mimmo Lucano a été une des cibles d’une politique identitaire xénophobe qui, quand elle en a eu l’occasion au pouvoir en 2018, a tout fait pour fermer les ports d’Italie, criminaliser les migrants et rendre leur condition encore plus difficile (notamment par le biais des « decreti sicurezza » – décrets sécurité – voulus par Salvini). Le procès s’est inévitablement teint d’une couleur politique, et la condamnation est arrivée trois jours avant l’élection à laquelle Mimmo Lucano était candidat, ce qui représente un autre cas inédit. Ce dernier avait d’ailleurs renoncé à la possibilité d’obtenir l’immunité parlementaire en refusant de se présenter aux élections européennes en 2019, quand l’enquête avait déjà commencé.

Suite à la condamnation, plusieurs manifestations de solidarité ont eu lieu en Italie et dans le monde. En France, une tribune co-signé par 300 personnalités et associations est parue sur Le Monde (voir ici). On peut lire ici, en italien, les détails du procès.

Nous faisons partie de celles et ceux qui expriment leur profonde solidarité avec Mimmo Lucano, et qui soutiennent la nécessité, quand il le faut, d’agir par et avec une légitimité qui ne coïncide jamais de manière saturée avec la légalité en vigueur. L’illégalité n’existe qu’en relation à des lois qui, dans le cas des phénomènes d' »accueil et intégration » des migrants, sont fort critiquables. Agir autrement que par un principe de légalité dans ces situations n’est pas seulement acceptable, mais souhaitable.