Le mythe de la caverne revisité. Un extrait tiré de: « Le retour de l’exil. Repenser le sens commun » (2021)

Voici un extrait du livre « Le retour de l’exil. Repenser le sens commun » (Le Pommier, 2021) écrit par Miguel Benasayag et Bastien Cany, co-animateurs du séminaire « Comprendre et agir dans la complexité ». Dans le chapitre V que nous publions, les auteurs proposent une réflexion sur le mythe de la caverne platonicien en le renversant. L’opposition entre le sens commun (les ombres de la caverne) et la pensée critique (la vérité dévoilée par la lumière de la connaissance intellectuelle) n’a plus lieu d’être. La pensée critique ne serait pas là pour porter sa lumière et ordonner le sens commun inévitablement lié à l’expérience vécue dans sa dimension corporelle. Il n’y aurait pas un plancher de réalité supérieure qu’il s’agirait d’atteindre en dépassant les figures ombreuses de la caverne de l’expérience et du devenir: les prisonniers de la caverne ne se trompent pas. Le sens commun et la pensée critique sont deux modes différents de production de la connaissance pris dans une tension permanente qu’il ne s’agit pas de dépasser par l’abandon d’une des deux dimensions, toutes deux composant l’ensemble organique qu’on nomme réalité.

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Nietzsche et le « Je pense »

« §16 Si j’analyse le processus qu’exprime la proposition “je pense”, j’obtiens toute une série d’affirmations téméraires qu’il est difficile, peut-être impossible de fonder ; par exemple que c’est moi qui pense, qu’il faut qu’il y ait un quelque chose qui pense, que la pensée est le résultat de l’activité d’un être conçu comme cause, qu’il y a un “je”, enfin que ce qu’il faut entendre par pensée est une donnée déjà bien établie, — que je sais ce qu’est penser. (…)

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Cavafis: « Ithaque »

Lorsque tu mettras le cap sur Ithaque,
fais de sorte que ton voyage soit long,
plein d’aventures et d’expériences.
Les Lestrygons et les Cyclopes,
et la colère de Poséidon ne crains,
ils ne se trouveront point sur ton chemin
si ta pensée reste élevée, si une émotion de qualité
envahit ton esprit et ton corps. Lestrygons Cyclopes,
et la fureur de Poséidon tu n’auras à affronter
que si tu les portes en toi,
si c’est ton âme qui les dresse devant toi.

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« N’envie pas les hommes libres de souffrance »

Hypérion – Hölderlin, 1799.

« Prends-moi comme je me donne, et songe qu’il est mieux de mourir parce qu’on a vécu, que de vivre parce qu’on n’a jamais vécu. N’envie pas les hommes libres de souffrance, les idoles de bois auxquelles rien ne manque, tant leur âme est pauvre, qui ne posent pas de questions sur la pluie et le soleil parce qu’elles n’ont rien qu’elles doivent cultiver.Lire la suite